Dossiers européens - état d'avancement de la réglementation
Accord sur des adaptations à Solvabilité II et l’instauration de mesures de redressement et de résolution
Sur quoi portent précisément les modifications apportées à Solvabilité II ? Un nombre important de modifications portent sur ce que l’on appelle les exigences quantitatives. Il s’agit de modifications apportées au calcul des exigences de capital (p. ex. pour le risque de taux et le risque sur actions) et des provisions techniques (p. ex. le montant de la marge de risque à constituer). La méthodologie pour le calcul de la courbe des taux d’intérêt sans risque et de la correction pour volatilité va être adaptée afin de mieux coller à la réalité des marchés financiers. Des modifications ont également été introduites sur le plan de la supervision des groupes et des activités transfrontalières. En outre, il y a également des modifications visant à intégrer davantage de proportionnalité dans les règles ainsi que de nouvelles exigences sur le plan de la durabilité.
En résumé, le résultat de la révision est positif pour les entreprises d’assurances, avec des corrections importantes au niveau du capital et de la solvabilité ainsi que davantage de marge pour financer la transition durable.
Outre des corrections, de nouvelles exigences sont également introduites, notamment sur le plan des mesures de redressement et de résolution afin de mieux faire face à des événements exceptionnels. Au cours des prochains mois, une réglementation détaillée sera élaborée au travers de règlements délégués et de normes techniques. Les directives européennes doivent en même temps être transposées dans les législations nationales. Les nouvelles règles entreront en vigueur à partir de janvier 2026.
Résilience et durabilité, les enjeux multiples du verdissement de l’économie européenne
L’année passée, les normes techniques de réglementation (RTS) sont entrées en vigueur pour l’ensemble du secteur en ce qui concerne la SFDR. Cette réglementation, imposant des mesures de transparence et de reporting tant au niveau des produits que des entités, est donc complètement implémentée. Complètement dites-vous ? Rien n’est moins sûr. En effet, cette année 2023 aura vu paraître une publication d’amendements visant à modifier ces RTS à peine entrés en vigueur, mais également le lancement de la révision du texte du règlement en lui-même. La SFDR n’a pas encore fini de se transformer et les défis liés à ces modifications sont aussi importants pour le secteur, qui doit les implémenter, que pour les consommateurs, qui doivent essayer, bon gré mal gré, de se retrouver dans ce labyrinthe d’informations. Il est certain que le secteur peut s’attendre à des changements fondamentaux du cadre règlementaire de la SFDR dans les années à venir. De son côté, la Taxonomie n’est pas en reste, les critères techniques de sélection des activités économiques portant sur la gestion des ressources maritimes, l’économie circulaire, la pollution et la protection de la biodiversité ont été publiés et sont dès lors applicables. Sans oublier l’inclusion, maintenant obligatoire et sous conditions strictes, de certaines activités économiques liées au gaz et au nucléaire.
Du côté de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), directive imposant un reporting bien plus détaillé que par le passé (sous la NFRD) et ajoutant l’obligation de le faire en utilisant le principe de double matérialité, l’entrée en vigueur s’est faite en janvier 2023 bien que le premier reporting sur l’année 2024 est attendu pour l’année 2025. En attendant, l’EFRAG continue de travailler dur à l’établissement des ESRS, qui sont les standards obligatoires pour le reporting en matière de durabilité. Le premier set de standards ayant été publié cet automne, il entrera en vigueur au 1er janvier 2024. Ce 1er set couvrant les obligations de transparence dites indépendantes d’un secteur, vise à améliorer la qualité, la comparabilité et la disponibilité des données liées à la durabilité. Le deuxième set de standards, dits spécifiques au secteur, est, quant à lui, attendu dans les années à venir. Entre-temps, l’EFRAG se fait fort de publier, dans les mois à venir, des lignes directrices permettant aux compagnies d’implémenter ces nouvelles règles de façon plus aisée.
Le verdissement de nos économies européennes est en marche et nul doute que ses objectifs et conséquences continueront à impacter le secteur durant l’année 2024.
Digitalisation, une course à la réglementation
En vue des prochaines élections, les institutions et agences européennes ont engrangé des progrès rapides en ce qui concerne de nombreux dossiers numériques au cours de l’année 2023.
Le Règlement sur les données a été approuvé en novembre 2023 par le Parlement européen et le Conseil après des négociations en trilogue. Ces négociations ont abouti à des modifications de la proposition qui vont d’une manière générale dans l’intérêt du secteur de l’assurance. Davantage de garanties concernant les secrets d’affaires ont par exemple été ajoutées, avec pour conséquence que les processus d’innovation au sein du secteur sont mieux protégés. L’échange de données est également mieux rémunéré. Malheureusement, le Règlement prévoit également un fondement juridique pour que les autorités publiques puissent avoir accès dans des circonstances exceptionnelles à des données qui sont en la possession des entreprises d’assurances et puissent les utiliser. Une proposition spécifique au secteur au sujet d’un cadre pour l’accès aux données financières (FIDA) a été publiée en juin 2023 et suscite un vif intérêt au sein du secteur. Le Parlement européen et le Conseil publieront leurs textes de compromis en 2024. Des progrès ont également été engrangés dans d’autres dossiers portant sur l’échange de données, par exemple la proposition relative à l’Espace européen des données de santé. Après les élections pour le Parlement européen, les négociations en trilogue aboutiront à un texte définitif.
La loi sur l’intelligence artificielle a été rapidement élaborée étant donné que la Commission européenne souhaite jouer un rôle de précurseur dans ce dossier. Elle a été complétée par des initiatives internationales. Elle se trouve pour l’heure au stade des négociations en trilogue. Au moment de la publication du présent article, les négociations en trilogue de la loi sur l’intelligence artificielle seront probablement terminées. Certaines questions ont donné lieu à de longues discussions (p. ex. en ce qui concerne les modèles de fondation, point sur lequel la France, l’Allemagne et l’Italie plaident pour moins de réglementation). Le Parlement européen et le Conseil se sont également mis d’accord sur des exceptions pour les systèmes d’intelligence artificielle présentant un risque élevé, ce qui rend possible le développement de davantage de systèmes au sein du secteur de l’assurance. À présent que les travaux relatifs à la loi sur l’intelligence artificielle sont bien avancés, les travaux concernant la proposition de directive relative à la responsabilité du fait des produits défectueux (PLD) ont repris et seront probablement terminés au moment de la publication du présent rapport. Cette proposition vise à adapter la directive relative à la digitalisation. Les discussions concernant la proposition de directive relative à l’adaptation des règles en matière de responsabilité civile extracontractuelle au domaine de l’intelligence artificielle (AILD) seront probablement reportées jusqu’à la nomination de la nouvelle Commission européenne.
Nous œuvrons également d’arrache-pied au développement de normes techniques de réglementation pour le règlement sur la résilience numérique opérationnelle pour le secteur financier (DORA), qui se poursuivra en 2024. Il vise un niveau semblable de cybersécurité au sein du secteur de l’assurance d’ici début 2025 et engendre également des coûts et des efforts importants pour le secteur.